Droit immobilier

Les incohérences du plan sectoriel zones d'activités économiques

Me Georges Krieger

 

Plan directeur sectoriel Zones d'actvités économiques

 

L’objectif louable du plan sectoriel zones d’activités économiques est d’éviter un développement cacophonique de ces zones. Cet objectif, partiellement réalisé, est terni par un dispositif peu réfléchi.

 

Mes études de droit m’ont appris qu’un règlement grand-ducal doit respecter la loi.

 

La loi doit être respectée par tout le monde, surtout par le ministre.

 

Dans ses articles 30 et 31, le projet de règlement grand-ducal pour les zones d’activités économiques ou PSZAE (plan sectoriel zones d’activités économiques) prévoit la création de zones tampons.

 

Il s’agit d’un corridor d’une largeur d’au moins 300 mètres à arrêter autour de toutes les zones d’activités économiques, sauf les zones communales. Elles entourent les zones d’activités de façon continue pour éviter le rapprochement de modes d’occupation du sol sensibles.

 

Il s’agit surtout d’éviter un rapprochement entre les zones d’habitations et les zones d’activités.

 

L’idée est bonne, l’exécution est simplement absurde.

 

Imaginons une zone d’activités de 10 hectares, soit 200 mètres sur 500 mètres. Pour une telle zone d’activités (où seront implantées toutes sortes d’industries), il faut créer une zone tampon de 78 hectares ! Si la zone d’activités s’étend sur 1 km2 (1000 m / 1000 m), la zone tampon sera de 1,56 km2 !

 

Quel gâchis pour un pays si étendu que le Grand-Duché de Luxembourg, où l’on affirme hautement promouvoir une habitation de plus en plus dense et aussi de plus en plus stressante pour les occupants.

 

Il est prévu dans le règlement grand-ducal que la largeur de la zone tampon peut être réduite, mais seulement si les contraintes urbanistiques existantes l’exigent.

 

Ce projet de règlement grand-ducal contrevient à l’esprit et au texte de la loi du 10 juin 1999 relative aux établissements classés. Ce sont les établissements classés, c’est-à-dire ceux qui créent un danger, une pollution (le bruit est une pollution suivant cette même loi) ou une incommodité pour leurs voisins qui doivent veiller à diminuer ces pollutions, les incommodités. Leurs demandes d’autorisation doivent indiquer d’une façon générale « les mesures projetées pour prévenir ou atténuer les inconvénients et les risques auxquels l’établissement pourrait donner lieu (…) pour les voisins, le public et l’environnement ». Le droit pénal a consacré depuis de nombreuses années le principe du pollueur-payeur.

 

C’en est fini ! La philosophie des PSZAE n’est plus d’imposer aux entreprises de trouver des solutions aux inconvénients qu’elles créent aux voisins (par exemple en plantant une zone de verdure, en organisant elles–mêmes leur propre zone tampon), mais d’imposer cette charge aux voisins. Dorénavant, ce sont les propriétaires voisins qui vont subir une servitude d’urbanisation draconienne (sans indemnisation, la loi le défend expressément), et une perte totale de la valeur du terrain (qui voudra acheter un terrain situé en zone tampon ?).

 

Le gouvernement organise des zones tampons en se désintéressant complètement de l’activité qui sera exercée dans les zones d’activités. Faut-il une zone tampon lorsque l’activité exercée est une activité de stockage, de prestations de services ?

 

Le règlement prévoit que dans les zones tampons seront situées soit des activités économiques compatibles avec les activités économiques existantes dans les zones d’activités, soit des plantations pour répondre aux points de compensation avec les exigences du ministère de l’Environnement. L’activité située dans les zones tampons doit respecter l’activité prévue dans les zones d’activités. Personne ne s’intéresse à la compatibilité de cette activité avec l’habitat avoisinant. Ne faudrait-il pas dès lors intégrer telles quelles les zones tampons dans les futures zones d’activité ?

 

Pour plus d'informations : commandez notre étude critique sur les plans directeurs sectoriels.

 

Maître Georges KRIEGER

Avocat à la Cour

 

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