Droit immobilier

Plans sectoriels, et le citoyen dans tout ça ?

Me Georges Krieger

PLANS DIRECTEURS SECTORIELS

"Den domme Bierger"

  (Article publié au Luxemburger Wort du 21 juillet 2014)

 

Le 27 juin fut publié en grandes pompes, ce qui était auparavant secret, les plans directeurs sectoriels (il faut s’imaginer que les dossiers ont été livrés par l’armée luxembourgeoise à toutes les communes en même temps !). Ils restent publics jusqu’au 28 juillet, à partir du 29 juillet, le citoyen n’a plus le droit de les consulter, seul Dieu (ou le ministre) sait pour quelle raison.

 

Le citoyen a le droit de présenter par écrit ses observations au collège des bourgmestre et échevins jusqu’au 11 août. Après cette date, il a de nouveau le droit de se taire. A partir du 12 août, tout retombe dans le secret.

 

Nous voilà dans une procédure qui n’en est pas une.

 

L’article 9 de la nouvelle loi sur l’aménagement du territoire décrit cette curieuse procédure, le sort qui va être réservé aux réclamations faites par les citoyens, qui se sont donnés la peine de rédiger une observation parfois pendant des heures entières. Les observations doivent être rédigées par écrit et obligatoirement être présentées au collège des bourgmestre et échevins dans un délai de rigueur, jusqu’au 11 août, date à laquelle la procédure perd son caractère public. Mais que fait l’administration communale avec les réclamations ? Au fond, rien n’est énoncé dans la loi, sauf que la commune établira (ou n’établira pas – il n’existe aucune obligation dans la loi forçant le collège échevinal à s’exprimer -) un écrit qu’elle adressera au ministre concerné. Nous ne pouvons pas dire qu’il s’agit d’un avis obligatoire ou volontaire, puisque ce même article 9 donne à la commune un délai de 4 mois à partir du 27 juin « pour se prononcer ». Par contre, il n’y a pas d’obligation pour la commune d’intégrer les observations du citoyen dans son avis, d’en envoyer une copie au Ministre, de répondre au citoyen, voire d’avoir au moins l’honnêteté d’accuser réception de la réclamation. Celle-ci n’aura aucun autre traitement que celui que la loi lui réserve : elle sera probablement classée dans un classeur et après un certain temps traitée par schredder et mise dans la poubelle, la poubelle bleue bien entendu, celle réservée aux papiers inutiles.

 

Le ministre ayant en charge l’aménagement du territoire doit rédiger un rapport de synthèse de ce qu’il a reçu dans les quatre mois, c’est-à-dire, d’un « je me prononce » de l’administration communale et des syndicats de communes, le cas échéant. Le rapport ministériel et l’avis du Conseil Supérieur (si ce dernier est parvenu au ministre dans le délai de 4 mois) seront joints au projet de plan directeur sectoriel. Les avis des administrations communales resteront secrets et seront probablement traités comme décrit dans l’alinéa précédent !

 

La chambre des députés (les représentants du peuple) n’a pas le droit de s’exprimer (c’est normal, puisque le peuple ne sait jamais ce qu’il veut) : la loi prévoit une simple déclaration du ministre du nom du gouvernement devant la chambre des députés, et puis c’est fini. Le plan directeur sectoriel est déclaré obligatoire par règlement grand-ducal.

 

J’ai beaucoup de problèmes à faire concorder cette procédure avec mes idées de démocratie et d’Etat de droit.

 

Pour plus d'informations : commandez notre étude critique sur les plans directeurs sectoriels.

 

Par Me Georges KRIEGER,

Avocat à la Cour

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