Droit immobilier

La coordination sécurité et santé dans le domaine du bâtiment et du génie civil, une fonction indispensable mais méconnue.

La coordination sécurité et santé dans le domaine du bâtiment et du génie civil, une fonction indispensable mais méconnue


La fonction de coordinateur sécurité et santé est généralement peu connue du grand public.

 

Pourtant la présence d’un tel agent est obligatoire (sauf en cas d'urgence déterminée par un cas de force majeure dûment motivée auprès de l’ITM) sur tout chantier où interviennent au moins deux entrepreneurs simultanément ou de manière successive.

 

Cette profession est réglée par le règlement grand-ducal du 27 juin 2008 concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé à mettre en œuvre sur les chantiers temporaires ou mobiles.

 

Qui peut exercer une telle fonction ?


Ne peut être coordinateur sécurité et santé qu’une personne détentrice d'un agrément délivré par le ministre du Travail précisant les activités que le coordinateur peut exercer (article 4 du prédit règlement).

 

Une telle fonction doit être exercée en pleine indépendance (article 12 du prédit règlement).

 

Quel est son rôle ?


En somme, un coordinateur sécurité santé doit s’assurer que le chantier ne présente aucun danger pour les travailleurs.

 

La coordination sécurité santé comporte deux volets : la coordination-projet et la coordination-réalisation ou chantier.

 

  1. Le coordinateur-projet


Ce dernier intervient lors de la phase de planification concernant les choix architecturaux, de matériaux et de techniques. Le coordinateur effectue un plan général de sécurité et de santé ainsi qu’un dossier adapté aux caractéristiques de l'ouvrage reprenant les éléments utiles en matière de sécurité et de santé à prendre en compte lors d'éventuels travaux ultérieurs. Dans ce plan se trouve notamment la liste des dangers et l’évaluation des risques, les mesures préventives des risques liés aux travaux et l’interaction des activités entre les différents intervenants (article 9 du prédit règlement).

 

  1. Le coordinateur-réalisation ou chantier


Cette personne a notamment pour mission de coordonner la mise en œuvre des principes généraux de prévention et de sécurité, l’adaptation éventuelle du plan général et du dossier adapté aux caractéristiques de l’ouvrage, la mise en œuvre des dispositions pertinentes concernant les principes de protection des travailleurs et l’application du plan général. Le coordinateur veille également à la prise de mesures pour que seules les personnes autorisées accèdent au chantier.


En bref, elle vient vérifier la bonne application des dispositions mises en place lors de la phase d’exécution du projet. 

 

Concrètement, pour ce faire, le coordinateur va visiter le chantier et tenir un journal de coordination, initié par le coordinateur-projet, dans lequel il reprend les décisions, les constatations et événements essentiels pour la conception du projet et la réalisation de l’ouvrage. Il note également les observations faites aux intervenants et les suites y données, les remarques des entrepreneurs, les manquements.

 

Sur quels types de chantiers intervient-il ?


Sur les chantiers temporaires ou mobiles où s'effectuent des travaux de bâtiment ou de génie civil où interviennent au moins deux entreprises (article 1 et article 2 point a)).

 

Il s’agit des travaux suivants : excavation, terrassement, fondations et soutènement, travaux hydrauliques, voiries et infrastructures, pose de réseaux utilitaires (égouts, conduits d’eau ou de gaz, câbles) et interventions sur ces réseaux, construction de tout genre, comprenant notamment les bâtiments, maisons uni et pluri – familiales, ouvrages industriels, ouvrages de génie civil, ouvrages d’art, les voies de circulation, tant routières que ferroviaires, fluviales et aériennes, montage et démontage d’éléments préfabriqués, aménagement ou équipement, transformation, rénovation, réparation, démantèlement, démolition, maintenance, entretien – Travaux de peinture et de nettoyage et assainissement.

 

L’intervention d’un tel coordinateur ne s’applique en revanche pas aux activités de forage et d'extraction dans les industries extractives (activités de prospection, d’extraction et de préparation des matières extraites pour la vente – concassage, triage-lavage à l'exclusion des activités de transformation des matières extraites).

 

Qui se charge de désigner un tel coordinateur ?


C’est le maître d'ouvrage qui désigne le/les coordinateur(s). Il peut avoir recours à des tiers ou exercer lui-même cette fonction (attention à bien disposer de l’agrément).

Lorsque le coordinateur est un agent du maître d'ouvrage lié à celui-ci par un contrat de travail, sa mission fait l'objet d'un document écrit permettant d'individualiser chaque opération.

 

La désignation des coordinateurs fait objet d'une convention précisant les tâches à accomplir, le début et la fin de la mission ainsi que les obligations du maître d’ouvrage.

 

A quel moment faut-il désigner un coordinateur ?


La désignation du ou des coordinateurs – projet doit précéder la phase d'élaboration des plans d'exécution (article 8).

 

La désignation d’un coordinateur - réalisation distinct de celui de phase de l'élaboration du projet doit intervenir au plus tard avant le lancement de la phase de consultation des entreprises (article 10).

 

Quelles sont les obligations respectives du maitre d’ouvrage et du coordinateur ?


Le coordinateur doit être associé à toutes les étapes relatives à l'élaboration du projet et à la réalisation de l'ouvrage, recevoir un programme des diverses réunions et être invité à ces réunions, recevoir voire exiger les études nécessaires à l’exécution de ses tâches, établir et mettre à jour le journal de coordination, remettre un dossier en fin de mission avec accusé de réception et conserver un exemplaire du journal de coordination pendant cinq ans à compter de la date de réception de l’ouvrage (article 3 du règlement précité).

 

Pour certains chantiers, un avis préalable doit être élaboré conformément à l'annexe III. Le maitre d’ouvrage doit le communiquer à l'ITM au moins 10 jours avant le début des travaux, et cet avis doit être affiché de manière visible sur le chantier. Il s’agit des chantiers :

- dont la durée présumée des travaux est supérieure à trente jours et qui occupent plus de vingt travailleurs simultanément ou ;

- dont le volume présumé est supérieur à 500 hommes/jours (article 6 du prédit règlement).

 

Ensuite, le maître d'ouvrage veille à ce que soit établi, préalablement à l'ouverture du chantier, un plan général de sécurité et de santé précisant les règles spécifiques applicables au chantier pour les travaux pour lesquels un avis préalable est requis ou pour les travaux comprenant des risques particuliers (annexe II) (article 5 du prédit règlement).

 

Le coordinateur sécurité et santé peut le cas échéant engager sa responsabilité civile, voire pénales, en cas de manquement aux missions qui lui sont conférées par la loi ou par convention (voir notamment la jurisprudence française à ce propos).

 

Qu’en est-il de la protection des travailleurs ?


Le règlement grand-ducal comprend tout un chapitre à ce propos ; il s’agit du chapitre VI.

 

Il est important de noter que si un maître d'ouvrage a désigné un coordinateur, ceci ne le décharge pas de ses responsabilités dans ce domaine (articles L. 311-1 à L. 314-4 du Code du travail). (Article 13 du prédit règlement).

 

Aussi, l’article 16 du règlement prédit prévoit les obligations incombant aux indépendants afin de préserver la sécurité et la santé sur le chantier.

 

***

 

Pour terminer, lorsqu’une entreprise fait intervenir des acteurs chargés de la surveillance sur les chantiers, il faut être attentif au fait que ces derniers ne sont pas nécessairement des coordinateurs sécurité et santé puisque pour certaines missions, ils ne font que de la surveillance et non de la coordination sécurité. Aussi, ces acteurs ne disposent pas forcément toujours de l’agrément requis à la fonction de coordinateur.

 

Cette fonction est donc encadrée et elle est essentielle dans un domaine où le risque d’accidents est élevé et où la bonne gestion des chantiers est primordiale.

 

 

Me Raffaela FERRANDINO – Avocate

Me Sébastien COUVREUR – Avocat à la Cour

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