Droit immobilier

[Copropriété] Répartition des charges pour les ascenseurs

Me Virgine ADLOFF


Quelles sont les charges à régler par les copropriétaires pour les ascenseurs ?

 

Pour répondre à cette question, il faut tout d’abord déterminer la nature de cet équipement.

 

Un ascenseur est à considérer dans une copropriété comme un élément d’équipement commun.

 

L’article 7 alinéa 2 de la loi modifiée du 16 mai 1975 portant statut de la copropriété des immeubles bâtis, stipule clairement que la répartition des frais peut se faire en fonction de l’utilité que ces éléments présentent à l’égard de chaque lot sauf convention y relative.

 

Soit, lorsqu’il s’agit d’un élément d’équipement commun, les frais seront répartis par n’importe quelle clef de répartition fixée dans le règlement de copropriété ou par une convention par laquelle l’unanimité des copropriétaires sans exception marque son accord ou encore par une décision d’assemblée générale prise à l’unanimité de tous les copropriétaires concernés.

 

Soit, Si rien n’est prévu dans le règlement de copropriété, la répartition des frais pour ces éléments d’équipement commun s’effectuera suivant l’utilité que cet élément d’équipement a pour chaque lot.

 

  • Ainsi, en ce qui concerne l’ascenseur, le mode de répartition retenu dans le règlement de copropriété prime qu’il soit équitable ou non.

 

Que le règlement de copropriété indique que les frais pour l’ascenseur se répartissent par millièmes ou par étage ou par des clefs différentes suivant qu’il s’agisse d’un logement d’habitation ou commercial, la règle y inscrite prime.

 

Les dispositions du règlement de copropriété étant une exception à la loi, elles sont de stricte interprétation.

 

Il faudra donc pour chaque cas d’espèce, analyser avec attention les dispositions contenues dans le règlement de copropriété.

 

En effet, certains règlements de copropriété prévoient un régime de répartition des frais pour la consommation d’électricité et l’entretien général de l’ascenseur. Certains règlements de copropriété prescrivent une règle uniquement pour les frais de réparation de l’ascenseur. Si seule la réparation de l’ascenseur est visée par le règlement de copropriété, l’entretien général et la consommation d’électricité ou encore la mise en sécurité de l’ascenseur ne sont alors pas prévus par ces règles de répartition édictées par le règlement de copropriété. Ces charges seront alors à répartir selon le critère fixé par l’article 7, alinéa 2 de loi c’est-à-dire selon le critère de l’utilité.

 

Pour répartir les charges de l’ascenseur, il faudra selon le cas, d’une part, appliquer le régime prévu par le règlement de copropriété pour les travaux y retenus et d’autre part, pour les travaux non retenus dans le règlement de copropriété, appliquer l’article 7 alinéa 2 de la loi modifiée du 16 mai 1975 portant statut de la copropriété des immeubles bâtis.

 

 

  • Si rien n’est prévu au règlement de copropriété, le critère de l’utilité tel que repris dans la loi, sera d’application pour effectuer la répartition des charges de cet ascenseur.

 

Une décision de principe a été rendue par nos juridictions luxembourgeoises en date du 22 février 2005 et a défini la notion d’utilité.

 

Le Tribunal a décidé que le critère d’utilité est l’utilité potentielle de l’ascenseur et non pas l’utilisation effective qu’en ferait tel ou tel copropriétaire. Par ailleurs, l’ascenseur offre une utilité pour un lot dans la mesure où il le dessert directement ou indirectement.

 

Les frais relatifs aux ascenseurs ne seront pas répartis au regard des besoins réels des occupants ou de l’usage qu’au gré de leur convenance personnelle, les copropriétaires feraient effectivement de l’équipement commun.

 

En conséquence, le Tribunal a décidé que les propriétaires des lots situés au rez-de-chaussée n’ont pas à contribuer aux charges d’ascenseur puisqu’ils n’ont aucune raison de s’en servir.

 

En revanche en ce qui concerne les autres lots d’habitation, l’ascenseur présente une utilité, lorsqu’il est établi que le copropriétaire du lot a la possibilité tant matérielle que juridique de l’utiliser.

 

Peu importe par conséquent, l’étage occupé ou le nombre de personnes occupant le lot ou l’usage effectif de l’ascenseur pour les occupants des lots.

 

Etant donné que l’ascenseur a une utilité identique pour chacun des lots, excepté pour les lots se situant au rez-de-chaussée, les copropriétaires ont à contribuer de manière égale aux frais y relatifs, peu importe ainsi leurs millièmes ou la superficie de l’appartement.

 

Bien évidemment cette situation peut changer en fonction des circonstances.

 

Si l’immeuble dispose par exemple de trois sous-sols alors le lot au rez-de-chaussée aura lui aussi une utilité objective de cet ascenseur. L’ensemble des lots, y compris ceux du rez-de-chaussée devra alors contribuer aux charges de cet élément d’équipement commun par parts égales.

 

Un arrêt de la Cour de Cassation française du 9 mai 2019 va peut-être venir modifier la position de nos juridictions.

 

La Cour de Cassation s’est interrogé sur la qualification du critère d’utilité. Ce critère peut-il être respecté lorsque la répartition s’effectue par parts égales entre les copropriétaires ? La Cour de Cassation a censuré la décision de la Cour d’Appel. Elle a affirmé de manière explicite « qu’est contraire aux critères d’utilité, une répartition par parts égales des charges d’ascenseur entre des lots situés à des étages différents ».

 

Appliquer une pondération en fonction de l’étage du lot et de sa superficie serait une méthode respectant le critère d’utilité objective, selon la jurisprudence française.

 

 

Me Virginie ADLOFF

Avocat à la Cour

 

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