Droit immobilier

La convention d'occupation précaire, en quelques mots.

Me Romain BUCCI



LA CONVENTION D’OCCUPATION PRECAIRE, EN QUELQUES MOTS. 


Définition et critères de distinction avec les notions voisines…


La convention d’occupation précaire est un contrat innommé (sui generis) (…) qui se caractérise par la fragilité des droits de l’occupant (…) dont l’installation n’est que provisoire, la fin des relations contractuelles étant soumise, soit à la volonté du propriétaire, soit à l’arrivée d’un évènement précis, soit à la conjonction de ces deux éléments.[1]

 

Il y a occupation précaire si quelqu’un reçoit un parent, un ami ou un invité en lui donnant logement sans lui accorder un bail.

 

Il faut distinguer l’hébergement, c'est-à-dire une convention d’occupation précaire, et le bail suivant les quatre critères qui caractérisent l’hébergement, à savoir : 1) la gratuité, 2) la nécessité, 3) la précarité et la préexistence d’un lien de parenté ou d’autorité entre parties.[2]

 

Il y a lieu également de distinguer la notion d’occupation précaire de la notion d’occupation sans droit ni titre. A la différence de cette dernière, l’occupation précaire implique nécessairement un titre « provisoire ».

 

 

Application concrète de la notion de convention d’occupation précaire dans la pratique …


Dans une affaire récente[3], il était question d’un litige existant entre parents et enfant.

 

En date du 31 août 2014, sans préjudice quant à la date exacte, les parties audit litige avaient signé un compromis de vente portant sur une maison d’habitation.

 

En vertu dudit compromis de vente, le contrat de vente notarié devait être signé au plus tard au mois d’octobre 2015 et l’entrée en jouissance avait été fixée au 1er septembre 2014, sans préjudice quant aux dates exactes.

 

Il s’est avéré que l’enfant, partie acquéreuse, a essuyé un refus bancaire de la part de sa banque.

 

Ce dernier n’a donc pu acquérir ledit bien immobilier et a dû libérer les lieux litigieux.

 

Suite audit refus bancaire, les relations entre parties se sont compliquées.

 

Suivant requête introduite par-devant le Tribunal de paix de et à Luxembourg, les parents ont sollicité la condamnation de l’enfant à leur payer une indemnité d’occupation pour la période d’occupation en question. Les parties requérantes (les parents) estimaient que l’enfant avait occupé la maison d’habitation sans droit ni titre.

 

A contrario, l’enfant, partie défenderesse au litige, estimait qu’une convention d’occupation précaire aurait existé entre les parties et a conclu qu’il aurait occupé ladite maison en vertu d’un titre, à savoir le compromis de vente.

 

Le Tribunal de paix de et à Luxembourg a considéré que :

 

« Le compromis de vente ne prévoit aucune compensation financière en contre partie de la jouissance des lieux de l’enfant.


Les parties s’accordent à dire également que l’entrée en jouissance des lieux trouve son fondement dans le compromis de vente. L’enfant a dès lors pris possession des lieux avec l’accord des parents.


Le tribunal retient dès lors que les requérants ont mis à disposition de la partie défenderesse une maison d’habitation en vertu d’un accord sui generis et ces derniers ne sauraient être qualifiés d’occupants sans droit ni titre pour la période en question. 


Il y a donc lieu de conclure qu’un contrat d’occupation précaire s’est conclu entre les parties qui se définit comme un accord entre parties sur une occupation sans titre jusqu’à révocation ultérieure du droit.[4]».

 

Il est ainsi prépondérant, dans ce domaine du droit comme dans d'autres, de qualifier précisément, sur base de leurs éléments constitutifs, les conventions entre parties. L'enjeu ici, étant la gratuité - ou non - de la relation contractuelle, l'on comprendra aisément l'importance de veiller à rédiger avec soin celles-ci, respectivement de procéder à une interprétation correcte des termes du contrat.

 

Me Romain BUCCI

Avocat à la Cour

 

 



[1] Les Novelles. L louage de choses, les baux en général, n°47

[2] Le bail à loyer, Pas. 31, p. 292

[3] Tribunal de paix de et à Luxembourg, 15 mars 2018, jugement n°990/18

[4] Marianne HARLES, Le bail à loyer, Pas. 31, 292

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