Droit immobilier

Le paiement irrégulier des loyers : cause de résiliation du contrat ?

Me Romain BUCCI



Le paiement irrégulier des loyers : une cause suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de bail ? Une appréciation au cas par cas !


 

 

Principe

 

L’article 1728 du Code civil énonce que :

 

« Le preneur est tenu de deux obligations principales:

 

  1. 1. d'user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention ;
  2. de payer le prix du bail aux termes convenus»
   
   

Au moment de la conclusion de leur contrat de bail, il est de principe que les parties conviennent expressément de l’échéance de paiement du loyer total mensuel (loyer et avances sur charges).

 

Généralement, il est stipulé dans les contrats de bail que : « le loyer et les avances sur charges sont payables par le preneur praenumerando, c’est à dire par avance le premier de chaque mois sur le compte du bailleur. »

 

Il s’agit là ni plus ni moins que d’une obligation contractuelle dans le chef du preneur et sa violation saurait en principe justifier la résiliation judiciaire du contrat de bail sur base dudit article 1728 du Code civil.

 
 

Cependant, la pratique est toute autre chose… 

 

En effet, bon nombre de bailleurs se retrouvent dans une situation où leur locataire respectif ne paie pas, respectivement paie irrégulièrement le loyer et les avances sur charges (avec quelques jours/semaines/mois de retard) convenus entre parties.

 

Certains d’entre eux agissent par conséquent judiciairement aux fins de :

 

-          voir constater par le tribunal, l’inexécution contractuelle dans le chef du preneur ;

 

-          voir ainsi prononcer la résiliation judiciaire du contrat de bail litigieux.

 

Le paiement irrégulier des loyers : une cause suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de bail ? Une appréciation au cas par cas !

 

Principe

 

L’article 1728 du Code civil énonce que :

 

« Le preneur est tenu de deux obligations principales:

 

  1. 1.       d'user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention ;
  2. de payer le prix du bail aux termes convenus»

 

   
   

Au moment de la conclusion de leur contrat de bail, il est de principe que les parties conviennent expressément de l’échéance de paiement du loyer total mensuel (loyer et avances sur charges).

 

Généralement, il est stipulé dans les contrats de bail que : « le loyer et les avances sur charges sont payables par le preneur praenumerando, c’est à dire par avance le premier de chaque mois sur le compte du bailleur. »

 

Il s’agit là ni plus ni moins que d’une obligation contractuelle dans le chef du preneur et sa violation saurait en principe justifier la résiliation judiciaire du contrat de bail sur base dudit article 1728 du Code civil.

 
 

Cependant, la pratique est toute autre chose… 

 

En effet, bon nombre de bailleurs se retrouvent dans une situation où leur locataire respectif ne paie pas, respectivement paie irrégulièrement le loyer et les avances sur charges (avec quelques jours/semaines/mois de retard) convenus entre parties.

 

Certains d’entre eux agissent par conséquent judiciairement aux fins de :

 

-          voir constater par le tribunal, l’inexécution contractuelle dans le chef du preneur ;

 

-          voir ainsi prononcer la résiliation judiciaire du contrat de bail litigieux.

 

Que disent la Jurisprudence et la doctrine à ce sujet ?

 

En principe, le non-paiement des loyers aux échéances convenues constitue une cause de résiliation de bail.

 

L’obligation de payer le prix du bail constitue l’obligation principale pesant sur le preneur, alors que le prix constitue la contrepartie de la jouissance locative. La violation répétée de l’obligation du locataire de payer le loyer et les avances sur charges locatives aux échéances convenues constitue une violation grave des obligations du locataire justifiant la résiliation du bail.

 

Les tribunaux posent comme principe que le bailleur qui met à la disposition d’un locataire son immeuble est en droit de pouvoir compter avec une rentrée d’argent régulière et il ne saurait être contraint de patienter pendant des mois avant de rentrer dans ses droits[1].

 

Il appartient cependant toujours au juge d’en apprécier, en fonction des éléments d’espèce, si le manquement présente un caractère de gravité suffisant pour justifier la résiliation éventuelle[2].

 

En effet, selon les circonstances, le non-paiement d’un terme du loyer ou même de plusieurs termes peut être considéré comme cause insuffisante pour prononcer la résiliation du bail. Le rôle du juge est d’appliquer une sanction proportionnée à la gravité du manquement, compte tenu des circonstances.

 

Il est fréquent de constater dans la pratique que certains locataires régularisent leur situation en cours de procédure judiciaire, respectivement après avoir reçu convocation (avec copie de la requête en matière de bail à loyer en annexe) à se présenter à une audience par-devant la Justice de paix territorialement compétente.

 

Dans une affaire récente[3], le locataire avait régularisé sa situation en cours de procédure. Il ne subsistait plus aucun arriéré de loyer au jour des plaidoiries.

 

Au jour des plaidoiries, le bailleur avait tout de même maintenu sa demande de résiliation judiciaire au motif que les loyers continuaient à être payés avec un retard considérable (et ce même pendant l’instance judiciaire en cours (instance d’appel)).

 

 

Le tribunal avait jugé dans le cas d’espèce que :

 

« Même si dans le cas d’espèce, il résulte des explications fournies à l’audience que tous les loyers redus ont été réglés à la suite du jugement entrepris, (…) il résulte des extraits de compte versés en cause que les loyers du mois de mars 2018 à septembre 2018 n’ont pas été payés par anticipation, pour le 1er de chaque mois, mais avec des retards de 3 à 88 jours.

 

(…)

 

Au vu de l’importance des arriérés de loyers qui s’étaient accumulés en 2016 et 2017, ainsi que des retards persistants dans le paiement des loyers, il y a lieu d retenir que le locataire a gravement manqué à ses obligations et qu’il a porté préjudice aux bailleurs, en  les privant d’une rentrée d’argent sur laquelle ils étaient en droit de compter, pendant une période prolongée. 

 

C’est donc à juste titre que le juge de première instance a prononcé la résiliation du bail aux torts exclusifs de Monsieur X et ordonné son déguerpissement. »

 

La résiliation pourra ainsi être prononcée, le cas échéant, même si le locataire a apuré l’arriéré, compte tenu des antécédents et du retard systématique dans le paiement de ses loyers.

 

Conclusion : Le juge appréciera souverainement de la gravité du manquement du locataire. La tendance actuelle des tribunaux se veut plutôt protectrice des intérêts du preneur.  Il y a lieu de considérer que le paiement des loyers avec quelques jours de retard ne saurait justifier à lui seul la résiliation du contrat de bail aux torts exclusifs du locataire.

 

Me Romain BUCCI
Avocat à la Cour


[1] M. HARLES, Le bail à loyer, Compte-rendu de jurisprudence, n°101

[2] Les Novelles, Droit civil, tome VI, éd. 2000, n°388 bis

[3] Trib. Arr. Lux., 14ème chambre, 30 octobre 2018, numéro TAL-2018-02944 du rôle,

 

 

 

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