Droit immobilier

[Jurisprudence administrative - droit immobilier]

 

Autorisation de bâtir

 

Ordonnance – Sursis à exécution – Demande de Suspension – Survenance d’un préjudice grave et définitif – Rejet :


« Ainsi, il n’appert pas que le projet litigieux porte une atteinte grave aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de la propre propriété du requérant, dans le sens que la réalisation du projet litigieux voisin n’a pour effet ni de priver le requérant de la propriété de son bien, ni de porter à cette propriété une atteinte d’une gravité telle que le sens et la portée de ce droit s’en trouvent dénaturés, sinon considérablement amoindris. »-TA., 8 janvier 2021, rôle n°45400. »

 

Sites et monuments


Annulation – Arrêté ministériel – Article 17 alinéa 1 de la loi du 18 juillet 1983 - Absence d’intérêt suffisant – Faits et considérations manifestement insuffisantes :

 

« Si certes les maisons visées par l’arrêté ministériel litigieux possèdent notamment de par leur mitoyenneté un certain charme par opposition aux immeubles plus récents les entourant et si, le cas échéant, des erreurs du passé ont conduit à la destruction de maisons éventuellement dignes de protection ayant pu exister dans la partie de ... où est implantée la maison litigieuse, cet état de fait ne saurait servir de prétexte pour retenir que, de manière générale et automatique, et surtout sans justification suffisante, la maison litigieuse aurait une valeur intrinsèque telle qu’elle mériterait d’être conservée du seul fait que, de par sa mitoyenneté et de son style différent par rapport aux immeubles plus récents l’entourant, elle constituerait un ensemble à protéger. Plus particulièrement, eu égard à la circonstance non contestée que la maison litigieuse et celle sise au numéro … sont les dernières maisons mitoyennes du même style situées dans la partie inférieure de … où elles sont, en effet, entourées d’immeubles beaucoup plus récents s’étendant sur 7 étages et plus, aucune caractéristique architecturale ou esthétique justifiant leur préservation ne saurait valablement être tirée de leur prétendue qualité d’ensemble à protéger alors qu’il s’agit, au contraire, de deux objets isolés dans la partie du quartier … où ils sont implantés. Compte de tenu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que les faits et considérations sur lesquels s’est fondé le ministre pour prendre la décision litigieuse ne sont manifestement pas suffisants pour retenir que l’immeuble litigieux présente, tel qu’il le soutient, un quelconque intérêt historique, architectural et esthétique pour justifier sa préservation au sens de l’article 17, alinéa 1er, de la loi du 18 juillet 1983, les caractéristiques sur lesquelles le ministre entend se baser pour justifier l’existence d’un tel intérêt, devant, tel que relevé ci avant, apparaître de manière évidente pour justifier l’atteinte portée à la situation du propriétaire, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. TA, 16 décembre 2020, rôle n°43144. »

 

 

Préemption

 

Compétence d’attribution – Exercice du droit de préemption – Contentieux – Juge Compétent :

 

« Sous tous ces aspects, la décision d’une personne de droit public d’exercer le droit de préemption lui conféré par la loi pacte logement s’analyse en décision administrative individuelle détachable pour laquelle, dans la logique de l’ordonnancement juridique en place, compétence échoit en application directe de l’article 95bis de la Constitution au juge administratif afin de vérifier le respect des conditions afférentes prévues par la loi suivant un recours effectif devant le juge naturel de l’action de l’administration dans une hypothèse quasiment d’école comportant l’exercice de droits exorbitants du droit commun en vertu de prérogatives de puissance publique conférées par la loi. Aucune disposition de l’ordonnancement juridique ne prévoyant une compétence différente, le contrôle des décisions d’exercice du droit de préemption prévu par la loi pacte logement dans le chef des personnes de droit public y visées ne pouvait dès lors que relever du contentieux administratif tel que délimité par l’article 95bis de la Constitution en tant que faisant partie du contentieux administratif y visé. -  CA, 5 janvier 2021, rôle n°44939C. »

 

 

Droit de préemption – Ratios legis – Loi pacte logement – Compétences – Collège échevinal – Conseil communal :


« En conséquence c’est l’organe exécutif de la commune, à savoir le collège échevinal, qui se trouve prédestiné, notamment en application de l’article 57, nos 1 et 7, de la loi communale, de prendre à ce stade la décision d’exercer le droit de préemption, c’est-à-dire d’exercer une option prévue par la loi dans le chef de la commune. D’un autre côté, tel que les premiers juges l’ont également dégagé à bon escient, la décision d’exercer le droit de préemption implique nécessairement l’acquisition du bien immobilier préempté, aux conditions et modalités stipulées dans le compromis de vente ayant donné lieu à l’exercice du droit de préemption. Sous ce dernier aspect, par référence également à l’article 106 de la loi communale, l’intervention du conseil communal est également requise. CA, 5 janvier 2021, rôle n°44939C »

 

 

Droit de préemption – Article 3 de la loi pacte logement – Indications à fournir – Procédure :


« La Cour vient de dégager ci-avant, à partir des dispositions de la loi, de l’intention du législateur et plus particulièrement des objectifs clairs et précis de la législation mise en place dès 2008, que le droit d’exercer le droit de préemption comporte nécessairement l’obligation pour la commune préemptante d’indiquer avec clarté et précision l’objectif concret rentrant parmi au moins l’un des trois motifs prévus par la loi – création de logements accessibles pour des personnes économiquement plus faibles – travaux de voirie et d’infrastructure – travaux d’équipements collectifs – en ce que cette indication comporte l’engagement pour la commune de procéder à la réalisation de l’objectif indiqué dans une optique d’application efficiente de la loi conformément à son but.

 

[…]

 

Contrairement aux conclusions de la commune, la Cour ne sera pas amenée à faire application en l’occurrence de sa jurisprudence suivant laquelle, en cas de non-indication des motifs justifiant la décision prise au niveau précontentieux, une fourniture de ces motifs sera encore possible en phase contentieuse, à condition qu’ils aient existé au moment de la décision querellée. Il y a en effet lieu de distinguer entre la situation normale où, notamment en application de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, des motifs légaux sous-tendant la décision ne doivent pas seulement exister, mais sont à indiquer par l’autorité de décision sous les modalités y prévues et la situation de l’espèce où, en application de l’article 3 de la loi pacte logement compte tenu des objectifs clairs et précis de celle-ci, une condition essentielle de cet exercice valable du droit de préemption consiste en l’indication, dès la notification au notaire commis de la décision d’exercice du droit de préemption, d’un des trois motifs prévus par la loi en vue duquel cet exercice a pu intervenir, cette indication étant de manière corrélative l’expression de l’engagement communal dans le sens de la réalisation de cet objectif dans les meilleurs délais possibles compte tenu des circonstances du cas d’espèce.

 

Pareille solution s’impose d’autant plus que, suite à l’exercice du droit de préemption, le cédant sera obligé de signer avec le pouvoir préemptant l’acte notarié qui opérera définitivement le transfert du droit de propriété sur le bien immobilier en cause et qu’il ne saurait être admis qu’il obtienne une connaissance du projet concret avancé par le pouvoir préemptant seulement plus loin dans le temps dans le cadre d’une voie de recours exercée par lui à l’encontre de la décision d’exercice de son droit de préemption. - CA, 5 janvier 2021, rôle n°44939C. »

 

 

Marchés publics

 

Ordonnance – sursis à exécution - Article 11 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives – alléguation d'un préjudice grave et définitif  :

 

« la société requérante se borne à affirmer que l’exécution immédiate de la décision d’adjudication déférée avant que le tribunal administratif ne se soit prononcé sur le recours au fond impliquerait nécessairement, c’est-à-dire ipso facto, l’existence d’un risque tant définitif que grave, sans pour autant préciser d’une quelconque façon la nature et l’ampleur du préjudice allégué, si ce n’est de faire état du montant de son offre, respectivement de la valeur du marché, la société requérante n’ayant pas non plus précisé sa situation financière, ni procédé à une mise en perspective de la perte du marché en question par rapport à sa situation patrimoniale : la seule allégation d’un préjudice, non autrement précisé et étayé, est insuffisante, l’exposé du préjudice grave et définitif ne pouvant se limiter à un exposé théorique, se cantonner à la seule évocation de précédents ou encore consister en des considérations générales. » TA, ordonnance, 8 janvier 2021, rôle 45349.

 

Ordonnance – sursis à exécution – conclusion du contrat de marché public – absence de préjudice grave et définitif

 

« Il suit des considérations qui précèdent que, d’une part, le sursis à exécution de la décision d’adjudication n’est pas de nature à prévenir un préjudice grave et définitif au vu de la conclusion, d’ores et déjà intervenue, du contrat d’exécution du marché litigieux et que, d’autre part, le sursis à exécution du contrat ne relève pas de la compétence du juge administratif. » TA, ordonnance, 12 janvier 2021, rôle n°45471.

 

 

Me Sarah BURLET - Avocate au Barreau de Paris

Me Sébastien COUVREUR - Avocat à la Cour

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